Il ne pouvait pas y avoir de meilleur jour que le 1er avril pour, a contrario, vous proposer un sujet sur la désinformation. Pour quelle raison, ici, pouvons-nous nous intéresser à cela ? Parce que c’est d’actualité ? Un peu quand même.
La raison est cependant que les médiateurs professionnels sont souvent confrontés à ce phénomène relationnel. La rumeur est une vieille pratique sociale. Ragot, commérage, propagande, manipulation, tromperie, escroquerie morale ou intellectuelle, bidonnage politique, mythes, légendes, miracles et médisances. Encore ? Téléphone arabe, radio-moquette, radio bois-patate, légendes urbaines, théorie du complot. Et ? Hé bien les bruits de chiottes aussi, jusqu’aux mèmes qui ont consacré la renommée de Chuck Norris, le premier homme à avoir refroidi la mort…
Donc, je vous propose une balade au cœur des procédés de la désinformation. Je vous dirai même comment y faire face, comment faire le tri. Pourtant, rien ne vous oblige. On peut se complaire dans ces relations à l’information, comme dans un conte de fée. Néanmoins, cette pratique est rarement utilisée pour faire réfléchir. Elle est plus un procédé éristique qu’un moyen éthique.
Les Romains nommaient « fama » (racine de infamie), la parole médisante qui ressemble beaucoup à ce que nous appelons aujourd’hui, par l’influence de l’anglais, fake news. La déesse de cette pratique pouvait donc bien être Eris, la championne grecque de la Discorde. Cicéron en a parlé le concernant…
Exemples de désinformation
Des exemples, dont certains continuent d’avoir une audience. Ils fonctionnent parce que l’idée même de conception erronée, d’un mensonge, voire d’une manipulation, semble si incroyable que des personnes tendent à préférer que ça soit vraisemblable.
- Le monstre du lac écossais du Loch Ness. Un serpent géant, préhistorique (plésiosaure) ou non, hanterait les eaux de ce lac. C’est ce qu’un missionnaire évangélisateur irlandais, Colomba d’Iona, a fait propager en 556, en affirmant s’est fait obéir par l’animal lacustre de son invention. L’idée était de propager la nouvelle religion, le christianisme.
- Les sorcières de Salem. Une affaire qui date des années 1690-92, dans l’Amérique récemment colonisée. Au départ, des gamines jouent et, suite à des comportements que des adultes trouvent inquiétants, l’un des médecins va jusqu’à diagnostiquer une « possession du démon ». Une chasse aux sorcières est lancée, un procès et une trentaine de morts soit dans les geôles soit par exécution par pendaison, noyade ou écrasement par empilement de pierres.
- Hitler ne se serait pas suicidé en 1945. C’est ce que Staline a dit à une délégation américaine, pour « occuper les services secrets américains » et la rumeur s’est propagée.
- La rumeur d’Orléans. Elle a repris des racontars incriminants les juifs. Ce genre de rumeurs a été propagé dans plusieurs villes et semble s’être arrêté dans le courant des années 1980. Des jeunes femmes seraient enlevées dans des cabines d’essayage de magasins tenus par des juifs, pour les vendre dans le cadre de « la traite des blanches ».
- La création de fausses informations avec le couvert du “secret défense”
- désinformation dénoncée par Anna Arendt relative à la guerre du Vietnam ;
- la mise en scène de Colin Powell, devant l’ONU, qui a justifié la guerre en Irack. Il prétendait tenir une fiole d’anthrax, en assemblée du conseil de sécurité de l’ONU.
- La stratégie de la victimisation : l’utilisation de la rumeur et de la fausse information
- Le faux attentat contre Mitterrand
- L’utilisation des rumeurs en politique pour pouvoir les démentir et faire parler de soi
- Les références à l’environnement des “études scientifiques”, très illustratives, qui paraissent si vraisemblables qu’elles en deviennent des légendes dans le management et la gouvernance
- La grenouille jetée dans une casserole
- La courbe du deuil, d’E. Kubler Ross
- La pyramide de Maslow
- Le triangle de Karmann
- Les tests de quotient intellectuel et, depuis les années 1990, émotionnel
- etc.
Sources de la désinformation
Les sources des informations controversées ne sont pas les mêmes. Ce qui est à l’origine n’est pas nécessairement une intention manipulatrice. On peut assez aisément identifier qu’un environnement culturel chargé de croyances constitue un lit favorable à la désinformation. A contrario, pourrait-on dire, un environnement dont le référentiel est celui de l’usage de la raison pourrait sembler protéger contre la crédulité. Pourtant, il n’en est rien. Pourquoi ? Parce que la notion de “raison” est polysémique et en conséquence autorise la contestation des réalités
- une émotion partagée qui sert de support au traitement d’une information
- une erreur mélangée à une émotion
- une construction, jouant de l’émotion, pour faire passer un message.
- une idée blagueuse
- une stratégique de communication :
- discréditer, atteindre à la réputation, dévaloriser, jeter l’opprobre, humilier ou jouer sur l’immoralité, créer du soupçon
- faire peur pour faire passer des mesures sécuritaires et répressives visant à empêcher la contestation
- prétendre prévenir un danger en semant le doute sur sa survenance, généraliser des données statistiques et leur donner un fort écho
- victimiser, jouer au martyr par anticipation
- détourner l’attention, en utilisant le système a contrario, afin de faire parler dans un sens ou un autre, pour mettre à l’index, en jouant du mécanisme et pouvoir s’en prétendre victime…
- désigner un bouc émissaire
Pourquoi ça marche ?
Les mécanismes de la création des fausses informations acceptées comme vraies tendent à fonctionner parce qu’elles ont un rapport avec son propre fonctionnement. Trompé, nous pouvons avoir tendance à justifier que nous avions toutes les raisons d’avoir confiance, au point de défendre l’invraisemblable. C’est une variante de ce qui a été appelé “le syndrôme de Stockholm », au demeurant très controversé, ce qui ici peut bien être une référence paradoxale. En effet, la manière dont les faits ont été relatés relève plus de la fiction que de la rigueur.
Être dans une relation de confiance ou d’admiration, et préférer la maintenir, par une démarche de cohérence liée au principe de l’Harmonie de l’information en soi
- Se fonder sur des raisonnements de type sophisme ou syllogisme dont un éléments est hypothétique
- Se fonder sur des tromperies de nos sens, jusqu’à les mettre en évidence pour les exploiter à nouveau sous une autre forme
- Utiliser un mécanisme de tour de magie : attirer l’attention, focaliser, détourner l’attention, faire se concentrer, distraire, provoquer un étonnement…
- Utiliser les statistiques comme des éléments d’information présentant la réalité
Pour faire face aux informations douteuses
- Les trois passoires dites de Socrates
- L’activation des trois doutes de l’ingénierie relationnelle
- Distinguer les vérités : la réalité factuelle et la représentation idéologique. L’idée de vérité fait discussion parce qu’elle repose sur une confusion. Il y a ce que l’on peut constater et qui peut être vérifié, ce n’est pas une question de point de vue, c’est identifiable par tout un chacun ; il y a ce qui est d’ordre idéologique et moral, et là, en vérité, il n’y a pas de réalité. Ce qui trompe souvent, c’est l’usage des représentations métaphoriques, comme ces dessins familiers qui montrent que “c’est une question de point de vue, chacun sa vérité”.
Formation
http://www.epmn.fr : en initiation de médiation, le sujet est au coeur de la construction des points de vue, des croyances, des convictions et des certitudes, de tous les jeux d’influence, ainsi que dans la suite de la formation à la médiation professionnelle
En conclusion
Ma réflexion et cette compilation sont sans doute
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